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25 juin (25 km)
La vision de cette source d'eau chaude nous est revenue à l'esprit, et nous semblons être prêts à enfreindre la règle des 25 kilomètres par jour uniquement pour prendre un bon bain chaud. Il faut dire que, ayant dormi dans un backpacker la veille, nous avons pris une douche et sommes donc propre. Cela doit nous sembler anormal, et rien de tel qu'un bain sulfuré pour nous redonner l'apparence (l'odeur ?) de deux vrais marcheurs. Nous décidons donc de raccourcir quelque peu la distance de la journée à une petite vingtaine de kilomètres... Un tour des environs de Taupo, vers une
thermal area puis jusqu'à cette fameuse source, devrait suffire...
C'est partiiiiiii ! On est là (Hieu Hieu, vous vous souvenez ?), la
thermal area est là. Tiens, pratique, si l'on trace une droite, elle passe par les deux points. Pourquoi ne pas la suivre ? Allons-y gaiement. Mauvaise idée ! 1. Pour sortir de Taupo et vu le plan de la ville, on peut affirmer sans trop se tromper qu'on a parcouru √2 fois la distance prévue ; 2. Une fois dans la nature, on tombe nez à nez avec une armée de buissons à traverser. Il faudra sortir la machette, mais nous en viendrons à bout, surmotivés par les fumées que nous apercevons, au fond à gauche. Nous longeons cette rivière à sec mais fumante et odorante, puis nous essayons d'appliquer à nouveau la technique de la ligne droite pour rejoindre le
hot stream.
Nous nous rendons vite compte que nous sommes au beau milieu de propriétés privées... Il nous faut rejoindre une route, quelques dizaines de mètres plus loin, mais la peur du
farmer en colère est grande... Prenant notre courage à deux mains, nous enjambons clôtures et barbelés. Il faut maintenant se faire discret en passant devant cette grange. Trop tard ! Nous sommes repérés par... une dame qui nous propose de nous amener en voiture directement dans la baignoire ! Il s'agissait en fait d'un centre équestre, et la personne en question s'apprêtait à aller au centre-ville... Il est 11h20, et déjà trois paragraphes écrits... Je suis pas couché, moi. (Vous non plus, d'ailleurs, chers lecteurs assidus)
Plouf ! Nous y voilà. La température est... comment dirais-je... parfaite. Un bon 37°C. Une heure plus tard, nous nous décidons à repartir, l'appel du fish and chips que nous nous étions promis de manger avant de partir de Taupo aidant. Oui, la marche, c'est dur. On sort de Taupo à pied, on lève un pouce et Gniiiiiiii une voiture pile pour nous prendre. Merci. il s'agit de trois jeunes maoris au gangsta-look. Ce coup-ci, le bonnet a aidé. Comme dirait Nico, en faisant abstraction des "fuckin'" et des "bro'", il reste suffisamment peu de mots pour réussir à les comprendre. Ils nous déposeront à Turangi, soixante kilomètres plus loin, non sans nous avoir proposé de passer la nuit (ou plus) chez eux. "You gonna freeze your ass", nous ont-ils prévenus... hé, on verra bien...
Et là, c'est le drame (quelle journée, les amis, quelle journée !) Une des information centreuses nous conseille d'aller nous geler les fesses ailleurs. Circulez, y'a rien à voir, comme dirait l'autre. Le temps est sensé être très mauvais les trois prochains jours, la traversée du massif du Tongariro est donc impossible. Motivés comme quatre, nous courons acheter de quoi se ravitailler (pour quatre également) (sérieusement, on s'est trompés dans les quantités... on a porté un jour pour rien...) et partons derechef. Il est 16h et nous débordons d'énergie, l'heure n'est pas au plantage de tente. La pluie qui tombe semble ne plus nous atteindre. Avec quatre jours de nourriture sur le dos et un bidon d'essence rempli, rien ne peut nous arriver.
Nous apercevons, au loin, le Tongariro et son sommet à 1976m... Nous marcherons jusqu'à 18h35, au clair de lune, sous un ciel noir redevenu bleu. Le coin camping est extra, près d'une rivière... Satisfaits de ne pas avoir choisi la solution du jambonnage en backpacker pendant 3 jours ! À un poilinou près, de nouveau 25 kilomètres aujourd'hui, finalement...
26 juin (32 km)
"Good morning!" Nous a amicalement souhaité cette mystérieuse randonneuse, peu avant 7h... Petit déj' royal (il faut consommer le surplus de pain...), Nico va faire la vaisselle dans la rivière en essayant de ne pas se geler trop de doigts, qu'il aurait du mal à réchauffer avec son unique gant. Les flaques d'eau gelées nous confirment qu'il fait moins de 0°... Un ciel bleu et une vue magnifique nous accompagneront tout au long de la journée. Cela nous permet d'avoir un sujet de discussion : haïr collectivement la personne qui nous a dit que la
Tongariro crossing était fermée aujourd'hui.
Nous croisons quelques pêcheurs (dont une petite pêcheuse de 7-8 ans au sourire jusqu'aux oreilles, avec son grand père) allant taquiner la truite. Un des meilleurs endroits au monde, paraît-il. On en profite pour leur demander les chemins praticables du coin. Ils nous signalent un carrefour à ne pas louper — nous le louperons, bien entendu. Les kilomètres s'enchaînent et quelques douleurs aux pieds commencent à se faire sentir. Un beau trio, avec le sac...
Nous longeons d'abord la montagne Pihanga, propriété des maoris, puis la route le long du lac Rotoaira... Les dix derniers kilomètres auront lieu dans la forêt. Traversée d'un petit village maori qui paraît désert, et arrivée au canal près duquel nous plantons, pour la dernière fois, notre tente. Pour la dernière fois, nous partageons cette soupe de l'amitié, qui nous a réchauffés tous les soirs de grand froid pendant les 10 jours précédents... Pour la dernière fois, nous observons patiemment cuire nos pâtes...
27 juin (30 km)
Problème au petit matin : tout est gelé. Le lait en poudre se mélange mal à la glace. Il fait vraiment très froid, et nous ne sommes pas mécontents de parcourir la première dizaine de kilomètres sur la route, au soleil. Une trentaine de kilomètres nous sépare encore de Turangi, et nous avons bien l'intention de ne plus faire de stop... Il fera, à nouveau, beau toute la journée. "Un temps catastrophique pendant deux jours, au moins", qu'elle nous disait, l'autre... Arrivée au bord du lac Rotopounamu. Magnifique petit lac à l'eau transparente et aux plages de sable fin. Un endroit idéal pour manger... Seuls mais peinards. Le soleil brille, le saucisson n'est pas si mauvais, et le petit coup de rhum à la fin du repas n'est pas désagréable...
Nous rejoignons la route, jusqu'à un splendide point de vue panoramique sur Turangi et le lac Taupo. On sent que l'objectif de notre voyage est proche. La fin aussi. Deux des vieux pêcheurs rencontrés la veille au matin sont là, ne comprenant pas comment on a pu marcher jusqu'ici... On nous propose de nous ramener à Turangi en voiture, mais nous n'avons pas vraiment envie de raccourcir la fin de notre randonnée... Nous quittons la route pour pénétrer dans la forêt. De bonnes flaques de boue occupant toute la largeur du chemin et toujours à moitié gelées nous attendent. Nous le suivons jusqu'à Turangi. Épuisés mais heureux, nous nous dirigeons directement vers le point info. Les prévisions météo sont excellentes, à nous le Tongariro !
Nous nous devons de fêter ce retour à Turangi comme il se doit. Par un fish and chips, vous l'aurez compris... Un bon fish and chips pour quatre, cela va également de soi. Vincent, un français rencontré quelques minutes plus tôt, nous accompagne (en mangeant un fish and chips pour une personne, bouh, le petit joueur !) La soirée est agréable, nous apprendrons à une américaine à jouer à la belotte (version niçoise, avec enchères pour choisir l'atout) ; elle nous apprendra en retour à jouer à "Ianov", un jeu israélien simple et rigolo. Nous rejoignons notre dortoir sans trop réveiller ses occupants : un allemand, deux anglaises et un couple de néerlandais. Il est 23 heures.